Espagne

J.10 Par monts et par vaux

Par Le 09/09/2025

080925 pathidalgo atelierscène d'atelier, La Puebla de Cazalla chez Patricio Hidalgo

Beaucoup, beaucoup de routes, grandes, moyennes, petites, désasphaltées, non répertoriées par le gps, défoncées, chemins cabossés... La photographie "on the road" requiert une belle endurance. Après Séville, Lebrija, Sanlúcar, me voici pour quelques jours basé à Utrera pour mener à bien les premiers repérages du film documentaire en préparation avec Nathan Benisty (co-réalisateur) et Supermouche production. Soit la même équipe que celle du documentaire "Rafael Riqueni, ser flamenco", tourné en  2022 et diffusé sur la chaîne Mezzo.

Les rencontres, sous la houlette de Juan Diego M.C., se sont succédées, à La Puebla de Cazalla, avec les responsables du festival "Reunión de cante jondo", que les aficionados connaissent. Puis Morón de la Frontera, pour palabrer avec les forces vives du flamenco. Et retour à la Puebla, à l'atelier de Patricio Hidalgo, peintre andalou incontournable qui participe activement au montage du projet par sa gentillesse et son ouverture.

Préparer un film documentaire est un étrange exercice. Il s'agit de collecter du matériel pour élaborer une trame, plus qu'un scénario, capable d'intéresser le système de production et de financement, sans que personne ne sache exactement ce qui sera tourné, ce qui adviendra. Surtout dans le domaine du flamenco, où tout et rien peut arriver à tout moment ou jamais. On imagine la difficulté. Donc je marche sur des oeufs. Des perspectives géniales se dessinent, mais avant d'en parler, j'ai besoin de confirmations. Là encore, le principe de "confirmation" est aussi étranger au flamenco que l'eau à la mayonnaise. Et pour que la mayonnaise flamenca prenne, il faut sens aigu de l'improvisation. Attendez, ce n'est pas fini. En résumé, je suis en train de préparer et prévoir une improvisation... vous saisissez l'aporie?

Pourtant, les choses se dessinent. Après un temps de chou blanc et d'hésitation qui a duré plusieurs mois, j'ai enfin trouvé le bout du fil qui va me permettre de dérouler la pelote... la confiance s'établit peu à peu et les portes s'entrouvrent.

Demain Séville, pour de nouvelles rencontres, en particulier le compañero Pepe Lamarca, que je serai ravi de revoir dans le cadre d'un débat dont il est l'invité d'honneur...

à suivre, donc.

O

Poétique du prosaïque et vice versa

Par Le 13/08/2024

DON QUIJOTE DE LA MANCHA

 

Avant de prendre le départ, je voudrais apporter quelques imprécisions supplémentaires à propos de l'emploi, qui pourrait sembler intempestif, que je fais des mots "poésie", "poème", "poète"... Se dire poète n'a rien d'outrecuidant, sauf à considérer la poésie comme un domaine réservé à une caste dont on serait en droit de se demander qui décide qu'untel en est et tel autre non. J'entends d'ici grincer les dents des grincheux. Qu'elles grincent, elles finiront par s'éroder. Se dire poète relève d'une affirmation, celle d'une exigence personnelle, celle d'un engagement qui se donne pour moyen la pratique de l'Art. Aussi, pour que ce soit clair entre nous et que celles et ceux à qui cela ne conviendrait pas ne perdent pas davantage leur temps à éplucher le présent carnet, je précise que la Poésie est ici considérée dans son acception la plus ample, la plus généreuse, la plus ouverte, la plus libre. La Poésie, le lecteur et la lectrice l'entendront donc plus largement qu'en sa seule expression écrite, qui s'est accaparé l'appellation, l'a embourgeoisée. La Poésie s'offre à tout un chacun, libre à tout un chacun d'en disposer à sa guise et selon son génie. Le temps disposera de l'oeuvre. On ne peut attendre sa sanction pour se mettre à l'oeuvre.

&

Vivre poétiquement sa vie relève d'un choix personnel, qui va à l'encontre de la tendance dominante actuelle, irriguée par les principes marchands (qualité, réussite, efficacité, nouveauté - et son corollaire l'obsolescence - , mode, prix...) Dans la vie poétique, l'acte gratuit prime. L'efficacité importe peu. La victoire pas davantage. L'inutile et l'utile s'épousent. La fragilité est précieuse. L'erreur admise et nécessaire. Don Quichotte de la Manche n'emporte pas un seul de ses combats, il n'en a pas moins acquis ses lettres de noblesse et reste en selle depuis bientôt un demi-millénaire !

&

Je m'efforcerai de mettre en application la leçon de Don Quichotte, pour qui le poétique ne se distingue pas du prosaïque. Les moulins sont des géants. Le laboureur est un écuyer. La paysanne est une princesse.  L'aubergiste est un chevalier... Il indique que le poétique ne va pas de la chose à l'âme, mais de l'âme à la chose (j'aurai peut-être l'occasion plus tard d'élucubrer à propos de l'âme). Qui n'a pas l'âme disponible au souffle poétique ne saurait reconnaître la poésie en quelque sujet que ce soit - un visage, un paysage, un objet... Le poétique est un souffle, une tendance naturelle, innée, qui s'affine et se renforce dans le temps. Comme la capacité de courir de 100 mètres, de devenir un scientifique, un littéraire, un peintre, un musicien, un médecin... Le poétique émane d'une sensibilité qui dans le temps s'affine. Tout au long d'une vie poétique, c'est à dire vécue selon les principes de la Poésie. L'émotion, la beauté, la profondeur restent parmi les plus précieux de ces principes. L'art est une question de sentiment, de résonance avec le Tout. Une question d'Amour, considéré comme une modalité de la force universelle qui meut se monde, et prend un tour particulier en chaque coeur humain. C'est ainsi que je l'entends et le pratique.

à suivre...

©Olivier Deck

APPEL : Mmes et MM. galeriste, éditeur, directeur de centre culturel ou artistique, amateur d'art, organisateur, programmateur, collectionneur, chroniqueur, journaliste... si vous êtes intéressés pour soutenir ce projet, aider à sa production, sa publication, son exposition, sa présentation en public (exposition, publication, récital, lecture, chanson, projection, conférence...) n'hésitez pas à prendre contact par messagerie.