SUR L'ENNUi

Olivier Deck Par Le 24/05/2023 0

Dans DIVAGATIONS

Pleine lune sur le marais

L’ennui, je l’accueille comme il vient, quand il vient. Il toque à la porte? J’ouvre. Je l’invite à s’installer. Je prends un carnet de notes, une guitare, un livre, j’écoute une musique, je laisse aller librement les pensées devant un paysage, au pied d’un arbre, au volant d’une voiture, à l’ombre d’une terrasse, au fond d’un bistrot… Si l’ennui est intense, massif, alors rien. Je lui laisse toute la place. L’ennui, et c’est tout. 

L’ennui, je l’accueille comme il vient, quand il vient. Il toque à la porte? J’ouvre. Je l’invite à s’installer. Je prends un carnet de notes, une guitare, un livre, j’écoute une musique, je laisse aller librement les pensées devant un paysage, au pied d’un arbre, au volant d’une voiture, à l’ombre d’une terrasse, au fond d’un bistrot… Si l’ennui est intense, massif, alors rien. Je lui laisse toute la place. L’ennui, et c’est tout. 

L’ennui est le silence dans lequel peut monter une mélodie. L’ennui est la page blanche sur laquelle peut apparaître le poème, le dessin, une chanson, la trace fertile d’un souvenir. L’élucubration, la divagation, le délire savent y formuler l’avenir. L’ennui est une pause au sens musical, un repos, une détente. Je reviens au camps de base, lorsque je m’ennuie. À partir de l’ennui, je peux créer. Dans les moments d’indécision, de doute, d’épuisement, j’ai besoin de l’ennui pour me régénérer. Quand je m’ennuie, je me prépare, je me répare, je me repose, je me dispose, je retrouve des forces ou, plutôt, je vivifie la force de vie elle-même. 

Je dois m’ennuyer pour ne pas m’égarer dans l’agitation, la gesticulation. Quand je m’ennuie, je reprends mon souffle. L’ennui est peuplé de songes qui inspirent. L’ennui se meuble de questions qui redonnent le désir. Le désir de marcher, de découvrir, d’aimer. Il est l’espace de la rêverie, de l’invention de soi, le prélude de l’ouverture à l’Autre. Il dit: « Tu ne sais pas quoi faire? Ennuie-toi plus encore et trouve! Débrouille-toi avec toi-même. Sollicite-toi. Espère! »

Mon ennui n’est pas lié au désespoir ni au mal-être. Pas davantage associé à la tristesse, au renoncement, au néant. Il y a peut-être un soupçon de peur, dans l’ennui. Elle est indispensable. Je dois me plaire à l’ennui, mais ne pas m’y complaire. L’ennui, c’est le vide essentiel. Le temps de tous les possibles. Rien ne s’effondre en lui, ni par lui, sauf les illusions vaines, les erreurs, la perte d’estime, l’inutile. Je fais le point, quand je m’ennuie. J’agis en ne faisant rien. Ne rien faire, c’est faire rien. Action de l’inaction. Cela ne signifie pas ne pas être, ne plus être. Quand je m’ennuie, j’existe et rien d’autre, rien d’autre que rien, ce qui en l’occurrence est déjà quelque chose. Je vis au plus près de moi, sans le moindre divertissement ni le trouble des futilités. L’ennui est le cocon de l’envie. L’envie de vivre. De vivre encore. D’aller de l’avant. S’ennuyer, c’est exister dans son expression la plus simple, dépouillée, première. L’ennui est à l’allant ce que la nuit est au jour.

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